Mai2012 Mississipi

J’ai atteint le Mississippi et je me souviens. Il y a exactement vingt ans, je venais de quitter l’armée, le vaste monde et l’aventure m’attendaient, je me récitais du Rimbaud. J’étais parti jouer les fugitifs en Irlande chez Renaud, il avait une piaule à Dublin qui donnait sur une petite cour ou nous prenions le frêle soleil irlandais une cannette de Guinness à la main, je m’étais rasé le crane bien propre et portais la panoplie du red skin, docs et bomber bordeaux, lui s’était fait une brosse blond platine, nous écumions les pubs et concerts dublinois et nous sommes fait tatouer à l’épaule le dodo pirate qu’il avait dessiné comme drapeau de la République Forbanesque de Petite Ile, délire potache de branleurs du lycée du Butor dont je faisais partie. Et nous rêvions du Mississippi que nous allions descendre depuis les forêts canadiennes des Grands Lacs jusqu’en Louisiane, décor de sa 1ere B.D.  Dedans le Bayou, signée de son nom de plume Mad sur un scénario d’Appollo. Nous étions des personnages de Mark Twain, les chansons de Zachary Richard avaient leur place au mileu des Ramones, Pogues et autres punk bands que nous écoutions. Puis nos trajectoires ont divergé, chacun suivant ses rêves et les siens ont brusquement pris fin un soir de trop grand blues dans une baignoire aux eaux rougies. Une flache noire et froide va toucher le fleuve et il faudra vivre avec. Vingt ans après, me voici finalement devant le Mississippi, sans lui, il est impassible, les Peaux-rouges ont disparu, il ne reste plus qu’à descendre jusqu’en pays cajun. « Laisse le bon temps rouler ».

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